La barbe du père Noël
Denis Marie
21 avril 2021

Nous restons ce que nous sommes. Pour certains, cela peut être perçu de façon négative. Pour d’autres, c’est de façon positive qu’ils l’entendent. Parce que nous détenons une nature absolue et divine, en aucun cas nous ne devenons les formes ni les états relatifs que nous traversons. Nous pouvons le croire, mais cela ne peut se concrétiser. C’est aussi certain, qu’en aucune façon, l’eau ne devient les vagues agitées qui recouvrent sa surface. Nous restons ce que nous sommes. C’est une bonne nouvelle !

Ceci, si nous l’entendons, représente un levier de foi puissant, grâce auquel nous pouvons franchir les obstacles et progresser. Si l’illusion que nous vivons ne tient que dans un tissu de pensées et de croyances, nous relier à notre vérité est suffisant pour la déjouer et nous délivrer.

Démystifier, c’est se donner un éclairage. C’est susciter les circonstances d’une “mise en évidence”.

Toute explication, tout enseignement à ce sujet n’est pas suffisant pour qu’en nous cela devienne efficient. De même, qu’il est contre-productif d’envisager la démystification comme un “travail” ou une nouvelle façon de “pratiquer”. L’action de démystifier ne doit pas être confondue avec l’étape préalable de la compréhension. Ainsi qu’elle ne doit pas être appliquée tel un remède sur un mal. Démystifier, c’est se donner un éclairage. C’est susciter les circonstances d’une “mise en évidence”.

“L’abaissement” du personnage représente un prérequis incontournable si nous voulons qu’il perde l’emprise qu’il exerce.
En vérité, rien de ce qui provient de l’illusion et du personnage n’est mauvais et ne peut nous causer du tort. C’est uniquement l’importance et l’enjeu que nous plaçons en eux. C’est la volonté et l’énergie que nous y investissons. C’est cela qui crée le moteur de la croyance.

Aucune illusion ne détient de pouvoir par elle-même. C’est toujours parce que nous lui en accordons un que nous lui succombons.

Le théâtre et les spectacles de marionnette sont l’endroit d’une grande mystification. Pour qu’aux yeux des spectateurs cela fonctionne, chacun d’eux doit permettre en lui d’être mystifié. Aucune illusion ne détient de pouvoir par elle-même. C’est toujours parce que nous lui en accordons un que nous lui succombons. C’est aussi la même chose lorsque nous regardons un film au cinéma. Nous savons bien qu’ici rien n’est vrai. Pourtant, nous voulons être convaincus du contraire. Nous voulons nous laisser prendre afin d’en vivre l’aventure et les émotions.

L’illusion que nous croyons subir n’est que la nôtre. Elle n’opère que grâce à notre concours. Depuis tout ce temps, nous nous sommes laissés abuser en pensant en être victimes. Nous sommes pareils à un enfant, qui bien qu’il ait grandi, continue de croire au père Noël. Nous aimons le rêve et la magie qui s’en dégage. Aujourd’hui, concernant notre personnage, le fait de nous dire et de savoir qu’il s’agit d’une illusion ne permet pas de nous en réveiller. C’est d’une réelle confrontation dont nous avons besoin.

Plus qu’une explication, c’est une preuve, une démonstration indiscutable qui peut faire s’effondrer notre croyance.

Plus qu’une explication, c’est une preuve, une démonstration indiscutable qui peut faire s’effondrer notre croyance. C’est ce que j’appelle “tirer la barbe du père Noël”. Voilà le geste transgressif et révélateur que s’autorise un enfant. Celui par lequel il attrape et tire la barbe pour vérifier qu’il s’agit bien d’un postiche. Quelque part, il sait que l’homme devant lui n’est pas celui qu’il prétend être.
Finalement, il y a de quoi sourire. Beaucoup de détente et de paix résultent d’un mythe qu’on libère. En cela, rien n’est corrigé ou réparé, rien n’est éliminé ou gagné. Simplement, la vérité vient invalider notre croyance.

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